13) Fort Cochin

Kochi est un gros port industriel constitué d'un ensemble d'îles, au milieu des backwaters. Sur le continent, il y a Ernakulam qui possède tous les attributs classiques de la ville indienne : bruit, pollution, agitation et embouteillages, et tout à l'ouest, sur une presqu'île, il y a Fort Cochin,

Fort Cochin est la partie la plus ancienne de la ville, celle qui a connu les influences successives des Chinois, des Arabes, des Portugais (Vasco de Gama est mort ici) et des Hollandais : le résultat, c'est une ville où se cotoient hindous, juifs, chrétiens et musulmans, ainsi que les traces architecturales des passages de chacun.

Quand on arrive en bateau, on voit d'un côté les gigantesques infrastructures portuaires qui dépassent des cocotiers sur l'Ile de Willingdon, et de l'autre les vestiges des demeures coloniales de Fort Cochin.

Dès le premier abord, nous, ce qui nous a frappé, c'est le calme et la propreté de cette partie de la ville.

C'est avant tout un endroit extrêmement agréable, pas forcément très photogénique, mais vraiment très agréable (et pas seulement parce qu'on peut y manger du gâteau au chocolat dans des salons de thé chics ou manger de la quiche aux épinards dans des café branchés en se régalant de l'art contemporain local...).

Il faut dire que c'était d'autant plus calme le premier jour que tout le Kérala était en grève pour signifier à son gouvernement que le pétrole était devenu vraiment trop cher. Résultat : silence absolu dans la ville, pas un véhicule, pas un klaxon, à peine un ou deux petits commerces et de très rares restaurants ouverts : une aubaine pour se balader à pieds et goûter l'architecture de la ville.

Ca nous a permis d'étudier de plus près les techniques spécifiques de gestion du réseau électrique local, et de mieux comprendre pourquoi certains soirs, nous avons un peu de mal à vous écrire...

Bonne ambiance, décidément, cette ville, où les multiples terrains de sport, à l'ombre des gigantesques arbres multiséculaires qui bordent la plupart des rues, sont continuellement occupés.

Le lendemain, c'était dimanche... Suffisamment calme encore donc pour qu'on se risque à louer des scooters et à explorer la ville en version plus indienne en terme de mode de transport. Bon, certains vont nous prendre pour des fous, et c'est vrai qu'on ne peut pas à proprement parler considérer le déplacement en deux roues en Inde comme sûr, je vous l'accorde, mais finalement, à bien y regarder, au moins, c'est toi qui conduis, alors ce n'est pas forcément pire...

Et puis, ici, pour la première fois, on croisé des rickshaws qui prenaient les ronds points dans le bon sens, et même des gens avec des casques ! Bon, version indienne, le casque, hein, celui qui peut resservir si t'as des gros travaux à faire à la maison, mais quand même !

Le résultat, c'est que c'est absolument atroce et terrifiant sur les grosses artères, mais réellement génial dès qu'on se perd dans les ruelles ; on fait des kilomètres au ralenti, en en prenant plein la vue, on s'arrête n'importe où (mousson oblige...) et on trouve toujours quelqu'un pour venir taper une petite discute sous un auvent quelconque le temps que ça se calme, nous présenter toute la famille, ou même nous dégoter un chiffon bien propre pour assurer le confort des fessiers douillets des filles avant qu'elles ne remontent sur le siège détrempé...

On a trouvé ça tellement chouette qu'on a décidé de garder les scooters une deuxième journée pour tenter l'aventure sur une trentaine de km, sur l'île juste au-dessus de Fort-Cochin, à la recherche d'une plage paraît-il pas trop sale.

Au début, c'était rigolo : on est monté avec tous les copains sur un ferry pour rejoindre l'île en face, et on s'est pris un petit crachin anecdotique histoire d'être sûrs de faire le trajet avec le derrière mouillé, et puis après, soyons honnêtes, ça s'est un peu gâté : on est parti un lundi au moment du ruch du matin, sur une route drôlement plus fréquentée que ce qu'on croyait, et les 15 premiers km, vraiment, ça a été l'horreur... D'un coup, notre casque de chantier, on l'a trouvé drôlement moins rassurant que la veille...

C'est le moment où j'ai pété les plombs, arrêté mon scooter, et exigé qu'on change de route sinon je criais très fort, je me roulais par terre et j'arrêtais de respirer et tout le monde serait bien embêté... Du coup, Oliv', il a pris la première à gauche, il a disparu un petit moment, et il est finalement revenu avec un sourire suffisament convaincant pour que j'accepte de me relancer parmi les dingos et de le suivre... On a fait 500 m et là, franchement, d'un coup, on n'a plus rien regretté du tout...

D'abord, d'un coup, on s'est retrouvé tout seul, et puis... on s'est un peu perdu...

Finalement, la plage, comme c'était la mousson, elle avait disparu, mais toute une journée à tourner dans les backwaters, à passer au hasard d'une île à l'autre sur des ponts minuscules, et à avoir envie de s'arrêter tous les 10 mètres parce que là, vraiment, c'est trop beau, à traverser de tout petits villages où les gens tout surpris de nous voir là ne trouvaient rien de mieux à faire que de nous sourire, ben à l'unanimité, ça a fait de ce lundi une de nos meilleures journées en Inde...